Penstémons et chélones

Bourdon et fleur de penstemon

Famille des Plantaginacées, genre Penstemon, Chelone

On compte plus de 250 espèces de penstémons natives d’Amérique du Nord.

Les penstémons des jardins sont des vivaces. Leurs feuilles sont opposées, ovales à lancéolées, parfois linéaires, entières ou dentelées.

1) Penstémons : fleur et butineurs

Au début de l’été, des inflorescences se forment au sommet des tiges. Comme chez les sauges d’Amérique, on trouve des fleurs destinées aux abeilles, d’autres aux colibris, plus des intermédiaires.

La corolle est bilabiée, semblable à celle des digitales, de la même famille, les Plantaginacées. Elle est formée d’un tube court, suivi d’une vaste bouche ornée de 2 lèvres, la supérieure à 2 lobes, l’inférieure à 3 lobes.

Sous la voûte se trouvent le style et quatre étamines fertiles. En pénétrant dans la corolle, les butineurs frottent leur dos contre ces étamines. Il en existe une cinquième, stérile, appelée staminode, souvent barbu et saillant, posé sur le palais. Le nom Penstemon vient de penta-stemon, cinq étamines. Dans le fond du tube se trouvent l’ovaire supère et les glandes à nectar. Le palais de la corolle est orné de guides à nectar.

Images 1 et 2. La fleur à abeilles est bleu-mauve, bleu violacé ou blanche. Chez P. watsonii, le tube s’évase progressivement, comme un doigt de gant. Chez P. palmeri, il s’évase brusquement en une courte et large bouche comme ‘gonflée’. Le staminode de P. palmeri est saillant, doré et barbu.

Images 3 et 4. La fleur à colibris est rouge vif, tubulaire, étroite, adaptée à un bec de colibri.. La lèvre inférieure est réduite, parfois pliée en arrière (profil en tête de requin), pour empêcher un insecte de s’y poser. La fleur est souvent pendante, pour faciliter le pompage du nectar, abondant et fluide.

Entre la fleur à abeilles et celle à colibris, il existe une gamme de corolles aux couleurs et formes intermédiaires.

2) Penstémons de jardin sec, fleur à abeilles

La grande majorité des penstémons sont natifs de l’Ouest Américain et du Mexique, et poussent dans des rocailles semi-désertiques ou alpines, dans un sol minéral, bien drainé, avec peu d’humus, des étés torrides, des hivers glacials, de faibles précipitations annuelles. Assez délicats à cultiver, ils demandent de la passion et du savoir-faire, mais leur beauté est éclatante.

Ils amènent des couleurs exceptionnelles au jardin. Il est toujours étonnant de voir une abeille s’engouffrer dans la profondeur de la corolle bleue, violette, mauve, … Ils sont peu distribués en France, les plus connus en jeunes plants, les autres en graines. En voici quelques-uns :

  • P. campanulatus : hauteur 75 cm, corolle mauve.
  • P. cobaea : moins exigeant que d’autres, supporte mieux l’humidité, hauteur 60 cm, les plus grosses fleurs du genre, jusqu’à 6 cm de long, très florifère, corolle blanc rosé veinée de bleu. Parent de nombreux hybrides.
  • P. gentianoides : 60 à 150 cm, corolle bleu violacé.
  • P. glaber : 30 à 70 cm, corolle bleu ciel à violet.
  • P. grandiflorus : 60 cm, corolle bleu clair, grandes fleurs jusqu’à 5 cm.
  • P. heterophyllus : 50 à 100 cm, corolle bleue. Cultivars : ‘True Blue’, ‘Blue Spring’, ‘Zuriblau’ à corolle bleu gentiane.
  • P. mensarum : 60 cm, corolle bleu intense.
  • P. palmeri : 120 cm, corolle blanc rosé, grandes fleurs jusqu’à 4 cm. Le seul penstemon parfumé.
  • P. spectabilis : 120 à 150 cm, spectaculaire, corolle bleu violacé.
  • P. strictus : 80 cm, corolle bleu violacé. Robuste.
  • P. virgatus : 70 cm, corolle mauve.
  • P. watsonii : 60 cm, corolle bleue.
  • P. whippleanus : 60 cm, une couleur unique.

3) Penstémons de jardin sec, fleur à colibris

En voici quelques-uns, parmi les plus beaux :

  • P. barbatus : 80 cm, profil de la corolle en tête de requin.
  • P. cardinalis : 75 cm, bonne longévité.
  • P. centranthifolius : 120 à 150 cm.
  • P. eatonii : 80 cm et plus. Vie courte mais se ressème bien.
  • P. pinifolius : 20 cm, plante tapissante, feuilles étroites comme des aiguilles de pin.
  • P. pseudospectabilis ou penstemon du désert, 90 à 150 cm.
  • P. superbus : 150 cm, superbe !
  • P. utahensis : 45 cm, plante de rocaille.

En Europe, ces fleurs rouges à colibris sont peu visitées, à part des sphinx et des voleurs de nectar (bourdons, xylocopes).

4) Culture des penstémons de jardin sec

Éviter tout excès d’humidité dans le sol, ni en hiver par un sol mal drainé, ni en été par sur-arrosage. Un sol minéral, pauvre en humus (qui retient l’eau), non fertilisé, est indispensable. Pailler le sol pour éviter qu’il se dessèche vite en été.

Dans de bonnes conditions, la plupart des penstemons sont très rustiques.

Arroser régulièrement les jeunes plants jusqu’à ce qu’ils soient bien installés. Après 1 ou 2 ans, les arrosages doivent cesser ou être rares mais abondants, en profondeur. Avant d’arroser, écarter le paillage : si le sol est humide, reporter.

Les penstemons sont parfois de courte vie, comme chez les mufliers. Ils fleurissent quelques étés puis disparaissent sans raison apparente. C’est le cycle normal de ces plantes qui produisent beaucoup de fleurs et de graines dès la 1ère année. Pour les prolonger, supprimer les tiges florales avant la formation de graines qui affaiblit le plan. Cela stimulera de nouvelles pousses et parfois une 2iè floraison. Pour anticiper sur les pertes, il est conseillé de faire des boutures.

Certaines espèces sobres en eau sont plus faciles pour débuter. Il s’agit des penstémons barbatus, cobaea, glaber, grandiflorus, mensarum, strictus.

5) Penstémons polyvalents

Quelques rares espèces très rustiques viennent des climats pluvieux du Nord-Est américain, Canada compris. Ils ne tolèrent pas la sécheresse, et profitent d’arrosages occasionnels. Nettement plus adaptables que les précédents, ils conviennent à la plupart des jardins français. La floraison va de mai à juillet, avec des fleurs à abeilles très attractives. On trouve plusieurs références en graines.

P. digitalis. Hauteur 1 m et plus. Il forme à sa base, une rosette de grandes feuilles lancéolées d’où émergent de longues tiges florales, qui portent pendant 4 semaines environ des panicules de fleurs blanches.

P. digitalis est le parent de plusieurs sélections ou hybrides au feuillage vert bronze : il s’agit des penstemons ‘Husker Red’, ‘Mystica’, ‘Dark Towers’, P.Pocahontas‘ (superbe). Éviter le sur-arrosage ou l’apport d’engrais, qui feraient verser leurs tiges.

P. hirsutus et P. smallii sont deux espèces analogues à P. digitalis, à fleurs mauve violacé et moins hauts (60 cm).

Les hybrides

Des graines ramenées par les voyageurs ont permis des hybridations dès le début du 19iè siècle en Europe, en particulier en France (Victor Lemoine, vers 1860 à Nancy). Au début du 20iè siècle des centaines de cultivars étaient disponibles, la plupart oubliés aujourd’hui. Il en subsiste quelques uns, plus d’autres récents, qui dominent largement le marché. Leurs origines sont mal connues. Ils ont été sélectionnés pour s’adapter facilement à nos sols et à nos climats. Leur look horticole peut paraître démodé, avec des couleurs intermédiaires, fades, ou des corolles bicolores. Ils s’appellent Apple Blossom, Alice Hindley, Andenken an Friedrich Hahn, Blackbird, Firebird, Garnet, Gloire des 4 rues, Laura, Le Phare, Pink Bedder, Souvenir d’Adrien Régnier …

6) Les chélones ou Têtes de tortue

Les chélones sont des herbacées vivaces, natives de la moitié Est de l’Amérique du Nord, apparentées aux penstémons. Ils y prospèrent dans les zones humides et sous-bois et peuvent figurer dans un couvre-sol pour zone de mi-ombre. Les feuilles sont lancéolées à ovales, aux marges dentelées à dentées, d’un vert profond, disposées par paires opposées et décussées (décalées d’un quart de tour d’une paire à la suivante), comme chez les sauges.

La floraison se produit en fin d’été, en août-septembre. Les fleurs, roses ou blanches, sont groupées en épis. La corolle, tubulaire à 5 lobes, abrite 4 étamines, un staminode barbu et saillant, plus un ovaire et le style. Pour les butineurs, l’accès au tube est difficile : les deux lèvres, presque jointives, ne laissent qu’un espace étroit, encombré par les étamines et le staminode. Une façon de restreindre le nectar aux abeilles assez fortes pour se frayer un passage, comme les bourdons, leurs principaux pollinisateurs.

Les Acadiens appelaient les chélones Têtes de tortue, en référence à la forme de leur fleur, et Chelone signifie tortue en grec ancien. Il n’existe que 4 espèces formant le genre Chelone, dont 3 sont vendues en France :

Chelone obliqua et Chelone lyonii ont des fleurs d’un rose vif. Chelone glabra, moins ornementale, a des fleurs blanc rosé. Leur hauteur est inférieure au mètre.

Les chelones sont très rustiques (au-delà de – 20°). Ils se propagent lentement par leurs rhizomes jusqu’à former une colonie.

Les planter à mi-ombre dans un sol riche en humus, humide, et protégé du soleil par un épais paillis. Les arroser régulièrement en été, pour garantir leur belle floraison tardive. On peut les planter au soleil, à condition que l’exposition ne soit pas brûlante, et de veiller à ce que le sol reste humide.